Jacqueline Lux : "election time"

De Wikithionville

Jacqueline Lux n’habite impasse du sanglier que depuis douze ans. Elle n’est pas non plus la plus âgée des dames qui partagent la cage d’escalier. Madame Wolf est là depuis 50 ans, madame Gretten qui a 82 ans, vit au rez-de-chaussée parce qu’elle ne se déplace qu’en fauteuil ou avec ses cannes. Elle a quand même six marches à monter pour rentrer chez elle.


Jacqueline est seule depuis que son mari a été emporté en 2001 par un cancer, un mois et demi après sa retraite : il était soudeur dans une centrale nucléaire.


Seul changement ces derniers temps, elle est descendue du quatrième au premier étage. Et puis aussi, elle est tête de liste pour les élections du conseil d’administration de l’O.P.H de Thionville. Le vote aura lieu par correspondance d’ici la fin de l’année. Sur la liste de l’amicale de la C.N.L, la confédération nationale du logement, elle était suppléante de monsieur Cardillo qui lui a demandé si elle voulait bien se présenter cette année. C’est une responsabilité car il faut voter les budgets, donner des avis sur des questions internes à l’O.P.H et faire passer les demandes des locataires.

manifestation au siège parisien de panasonic

Elle témoigne aujourd’hui parce que les gens ne se connaissent pas vraiment et qu’ils ne savent pas souvent ce qu’il est possible de faire dans leur entourage proche. On ne s’occupe pas de ses voisins, rien vu rien entendu et en fin de compte on ne sait pas ce que les gens sont capables de faire pour le bien. C’est pour ça qu’elle a rejoint l’amicale, faire des choses avec les gens. Bien sûr elle n’a pas la capacité juridique de répondre à tous les problèmes mais elle est là pour faciliter les démarches et donner aux gens les moyens de maitriser leurs propres difficultés. Il s’agit de leur expliquer la situation qu’ils traversent et de leur montrer les possibilités qu’ils ont pour en sortir. La nécessité d’être à plusieurs pour avancer, c’est à Longwy qu’elle l’a comprise.


Jacqueline travaillait depuis neuf ans à Panasonic quand l’usine a fermé. Les ouvriers se sont battus un an et demi en travaillant d’abord et puis en occupant l’usine dès qu’ils ont su que c’était foutu. Elle n’aurait jamais pensé que cela arriverait, elle était là jusqu’à sa retraite et puis voilà…Elle savait qu’à cinquante six ans elle ne retrouverait pas de travail. Panasonic était la première entreprise attirée sur le bassin de Longwy par des subventions de l’état, à partir dès que les subventions sont arrivées à terme. Ces entreprises ne font pas attention aux petites gens.

Pour s’occuper et travailler quand même Jacqueline a fait de la vente en réunion. Elle n’a jamais gagné ni perdu d’argent en vendant ces pots en plastic et ces aspirateurs, mais elle voyait du monde et travaillait en équipe. Jacqueline fait partie de la C.N.L depuis 2006. Elle est devenue trésorière. L’amicale n’a pas beaucoup de moyens, pas de téléphone à la permanence de la rue de Douai et pas beaucoup de bénévoles pour tenir les permanences. Deux fois par mois les permanences ont lieu à la maison de quartier de la côte des roses mais la salle n’est pas facilement accessible. Enfin, on ne peut pas se décourager quand on sait qu’on est utile. La C.N.L a largement inspiré la campagne des poubelles enterrées à la côte des roses. Plus rien ne traine, plus d’amoncellements d’ordures. Ca fonctionne très bien pour peu que les locataires prennent leurs responsabilités et téléphonent aux encombrants pour enlever les objets dont ils se débarrassent. Dans les immeubles de l’O.P.H les gens nettoient leur palier et sont taxés s’ils ne le font pas : ça responsabilise. La côte des roses est décriée mais on y vit très bien. Cette année, jacqueline et ses voisines de la cage d’escalier ont remporté un prix au concours des balcons fleuris !





article publié dans saisir le changement[1]