Gabriel Audibert habite la rue du pic-vert depuis 35 ans maintenant. C'est à la fin à la fin des années soixante qu'il est venu de Toulon s’installer à la côte des roses . C’est un immeuble calme et il reste encore beaucoup de gens de l’époque où la plupart d’entre eux travaillaient aux laminoirs. Ils formaient une sorte de communauté et les choses se passent mieux quand les gens se connaissent.
De 1972 à 1983 Gabriel Audibert a siégé au conseil municipal de Thionville aux côtés de Paul Souffrin qui lui avait proposé d’être sur la liste à l’époque où il était délégué syndical CGT aux laminoirs.
Elu, il était devenu président du syndicat des transports routiers et travaillait en lien avec les services de la DDT pour intervenir avec le bon sens du citoyen sur les tracés de route et de rond point de l’agglomération de communes.
Mais avant cette vie thionvilloise, Gabriel avait déjà une existence bien remplie.
A treize ans déjà, il était fier de pouvoir travailler comme porteur de cageot au marché, apprenti plombier et toute sortes de petits métiers.
Sur le port de Toulon, les enfants montaient en catimini sur les tartanes qui revenaient d’Espagne chargées d’oranges et de vin. Les enfants goûtaient le vin en perçant les barriques avant de les colmater soigneusement : ainsi, pour une gorgée de vin dérobée, les marins laissaient faire.
A dix huit ans Gabriel s’engage dans la marine et participe à la campagne de reconquête de l’Allemagne. Ils étaient quatre a bord d’une barque en patrouille sur le Rhin. C’était à hauteur de Kehl, complètement évacuée par la population allemande, il fallait empêcher les pillages.
A dix neuf ans Gabriel se retrouve en Indochine. En 1954 et pendant deux ans, Il est cuisinier du bord et canonnier sur le Jules Vernes, un navire atelier. Il sait ce que ça fait de pilonner un village sur la côte.
Après la guerre, alors qu’il est en poste à New York, Gabriel sera sollicité par l’ambassadeur pour servir dans ses cuisines. Mais il est marié à Toulon et refuse. Quand il a fait un choix il s’y tient.
Il sera le cuisinier du préfet maritime de Toulon. C’est un bon poste, mais la famille s’agrandit et il lui faudrait partir en mer pour arrondir ses fins de mois.
L’amiral en poste acceptera de se séparer de lui et exigera pour lui le plus petit bateau de la flotte. Notre quartier-maitre-chef embarque donc sur un chasseur 131 que nous ont laissé les américains en partant et ainsi il fait la navette entre Port-Petiot et les salins d’Hyères, dans la rade de Toulon.
Devenu veuf, Gabriel Audibert retraité de la marine, se décide à partir vivre en lorraine à l’âge de cinquante ans. Il sera d’abord gérant d’une petite épicerie à Yutz en face de l’église. Puis il entre aux laminoirs et se remarie en 1975. A cette époque, Il descendait encore régulièrement à Toulon voir ses filles.
Aujourd’hui il a 87 ans et ne fait plus la route vers Toulon.
Mais il a toujours la forme et dès que le temps le permet, il joue aux boules.
Et en février de cette année l’assemblée générale des Trois Boules a élu Gabriel Audibert vice président de l’association, donc ils sont contents de lui. Il sait mettre de l’ambiance et arrondir les angles. Les responsabilités, il faut aimer ça. Faire du bien et arranger les choses si possible, accepter de dialoguer, être logique, pas sectaire et surtout pas de privilèges !
Monsieur Escobar est le président et le comité compte sept membres qui décident en dernier recours. L’association n’a pas d’accréditation sportive et ne peut jouer sur le boulodrome municipal mais tout le monde se retrouve autour du terrain au bas de la rue Racine, dès qu’il fait beau, à jouer et discuter en buvant une bière ou un soda. Le bar portatif est confié aux bons soins du trésorier, Franco Frangella et quand il fait mauvais, il y a le local de repli pour jouer à la belote car il ne faut pas oublier, le nom de l’association c’est « les Trois Boules et Loisirs » !